Poème

À la marge

 

À la marge, une écriture en lisière

 

Il n’y a pas de point d’ancrage, pas de centre autour duquel s’articuler. Seulement des frôlements, des écarts, des failles ouvertes sur l’indicible. Ce poème est une dérive, une langue brisée qui refuse de s’agenouiller sous le poids du sens commun. Il est l’écriture de la marge, celle qui ne s’aligne pas mais vacille, se plie et se tend, prête à rompre.

“Les murs saignent de leur propre blancheur,
égratignés par mes ongles –
cette geôle est une paume qui ne se referme jamais.”

Il y a ici des voix qui trébuchent, des corps sans refuge, des amours sans rivage. Il y a la mer qui ne retient personne, le vent qui écorche les visages, la nuit qui ronge ce qu’elle ne peut contenir. Chaque phrase est une griffure sur la surface du monde, une tentative de fixer l’éphémère avant qu’il ne se dissolve.

“Regarde-la nager
comme d’autres incendient.
Elle fend le bleu,
elle fend le monde.”

Les personnages qui hantent ces pages ne demandent pas d’être compris. Ils existent dans le clair-obscur, dans l’angle mort des certitudes. Ils sont ceux qu’on ne voit pas, ceux qu’on refuse de nommer, ceux qui se consument sans jamais s’éteindre.

“Amours torches, amours fauves,
bêtes splendides qui rugissent dans l’interdit,
ils brisent les codes et les os,
ils saignent et brillent,
trop vastes pour les cages,
trop fous pour la lumière.”

J’écris pour ce qui brûle avant d’être dit. Pour les âmes nomades qui refusent de se clouer à une existence balisée. Pour les ombres qui dessinent des visages au creux du silence. À la marge, il n’y a ni vérité ni conclusion, seulement la persistance d’un éclat, l’empreinte fugace d’un pas dans la poussière.

“Quelque part, une harpe déchire la nuit,
une clameur de bataille s’échappe des pierres,
et sous nos cils, le feu danse encore.”

Il n’y a rien à posséder ici, rien à ordonner. Juste un fil tendu entre la lumière et l’abîme, entre l’absence et la fulgurance. À la marge, il n’y a pas de réponse, seulement la nécessité d’écrire, encore, pour que quelque chose subsiste dans la déchirure.